A dévorer !

« Paris Hollywood », Cécile Mury : remake cinq étoiles

Marianne Corvo est journaliste cinéma « à L’œil Hebdo, le premier magazine culturel français » (p.10). Les interviews d’acteurs et autres critiques de films sont son quotidien. Le jour où elle doit rencontrer Ben Whyte, un acteur de renommée mondiale et à la filmographie riche de prestigieuses récompenses, signe pour elle l’apothéose de sa carrière : elle adule le charismatique Néo-zélandais, comme n’importe quelle entité féminine douée d’une once de bon sens.

Seulement, la rencontre vire au cauchemar pour Marianne : maladroite en diable, l’interview vire au fiasco. Seulement, alors que Ben Whyte est réputé pour malmener les journalistes face à lui, l’alchimie opère : franchement amusé par la candeur inédite de la Parisienne, l’acteur lui donne une chance en lui accordant non seulement du temps, tellement minuté pour lui, mais également des entrevues inédites.

« -J’ai envie de rester, tu sais. Mais…
– Au revoir, Ben Whyte. Merci pour la parenthèse. » (p.147)

Vous craignez la romance bourrée de clichés ? Rassurez-vous : si le récit joue effectivement avec les codes romantiques des âmes sœurs qui toujours se cherchent mais à chaque fois se manquent toujours un peu (en cela, j’y vois une claire – et intelligente – réécriture du roman culte Un jour de David Nicholls), l’ironie a bonne place dans le roman. En effet, à travers la narration menée à travers la voix de Marianne, les saillies très second degré insufflent un humour décalé qui, tout justement, mettent à distance les clichés inhérents au genre. Les personnages sont non seulement fouillés mais aussi complexes, ce qui permet d’accorder au texte une crédibilité méritée.

« Tu peux te repaître de sa chaleur, mais n’oublie pas : tu n’es qu’un mouton de plus pour Sa Royale Bergerie. Tu vas finir à la broche. » (p.211)

Le regard porté sur la célébrité est lui aussi d’une belle pertinence : derrière les strass et les paillettes, l’envers du décor, millimétré, cadré et encadré, ne fait pas forcément rêver. La traque de Ben Whyte par les paparazzi relève de la mise à mort d’une chasse à courre. Marianne peut-elle, au nom de son affection pour la (sa ?) star, devenir l’autre victime consentante de la curée ?

« Il pourrait avoir un autre nom. Un autre métier. On se serait rencontrés dans un bar, dans la rue, sur Tinder. Bien sûr, il plaîrait aux gens. Mais pas par millions. Il serait à moi, tout le temps. Mais peut-être que je me raconte des histoires. » (p.321)

Derrière l’homme aux mille visages que ses rôles lui confèrent, quelle mythologie médiatique, forgée pour les besoins de la cause, le prive de l’authenticité de son humanité ?

« Comment peut-on vivre au centre de cette monstrueuse attention ? Partout. Tout le temps. Ce mec, c’est l’œil d’un cyclone. Un danger public. » (p.144)

Les plus belles histoires d’amour ne sont sans doute pas celles qui s’affichent sur un écran de cinéma, mais celles qui célèbrent des liens sans artifice. Plutôt que le feu aveuglant et tentant des projecteurs, envisager la douceur naturelle des rayons d’un vrai soleil, aussi informel soit-il. Pourvu qu’il soit vrai, on ne risque point de s’y brûler…

Un roman idéal pour l’été ! A savourer !


Paris Hollywood, Cécile MURY, éditions FLAMMARION, 2025, 444 pages, 21.50€.

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