A dévorer !

« Un couple parfait », Elin Hilderbrand : linge sale en famille

Celeste Otis s’apprête à convoler en justes noces avec Benji Winbury, un riche héritier né avec une cuillère forcément dorée dans la bouche. Elle, la modeste et peu sociable responsable d’un zoo new-yorkais, s’étonne encore d’avoir ravi le cœur d’un homme parfait sous tous les angles. Seulement, depuis que le mariage est annoncé, Celeste s’est mise à bégayer. Est-ce dû au cancer qui gangrène sa mère et la conduit inexorablement à une mort certaine ? Telle une poupée docile, Celeste se tait et acquiesce à tout. Pourtant, elle semble peiner à déglutir… Quelle vérité semble bien difficile à avaler pour la future mariée ?

« Leur clan, celui des Winbury, est particulièrement chanceux, pas seulement en raison de leur argent, de leur statut social et de leurs avantages, mais aussi parce que, selon les normes actuelles, ce sont des gens « normaux ». Ils forment une famille heureuse et normale. Une famille, aurait-il dit, exempte de drames et de secrets. » (p.275)

En même temps, Greer, sa future belle-mère, a décidé de s’occuper de tout. Sa position privilégiée, son argent et sa renommée d’écrivaine semblent légitimer toutes ses décisions, et elle ne saurait souffrir que l’on s’y oppose. Alors, c’est dans l’ultra-luxueuse villa de Nantucket que le mariage sera célébré, Greer aux commandes. Pour son fils chéri, rien ne sera trop beau, et dépenser plusieurs centaines de milliers de dollars peut passer pour une bagatelle, tant que l’on irradie d’une opulence affichée et assumée.

« Celeste et Benji n’ont pas besoin de former un couple parfait. Ça n’existe pas, les couples parfaits. » (p.216)

Seulement, aux aurores du mariage, la demoiselle d’honneur de Celeste est retrouvée morte sur la plage jouxtant la villa des Winbury. Accident ? Le dîner de répétition bien arrosé de la veille pourrait expliquer un malaise puis une noyade. Meurtre ? Qui alors ?

« Quelque chose s’est très mal passé la nuit dernière, c’est évident. » (p.66)

Des suspects, il y en a forcément, et les Winbury ne font pas exception. La police locale, mise sur l’affaire manu militari, entreprend d’enquêter auprès de chacun des protagonistes du mariage, au cœur de l’intimité de secrets étouffés finalement lâchés à demi-mots. Greer, son volage de mari Tag, Benji et Thomas leurs fils, Shooter le témoin, Feather l’amie de longue date un rien gênante… Les policiers ne tirent pas sur un fil, mais une bobine de nœuds dont on se régale.

« Qu’une famille aussi riche et respectée que les Winbury ait un second récit se déroulant en profondeur sous le premier, à la manière d’un ruisseau noir et trouble, est parfaitement logique – ou alors totalement absurde. » (p.347)

Dans un ballet amoureux huppé où il est de bon ton de cultiver l’aura d’une apparence impeccable, les sourires se révèlent peut-être trop figés et les réparties un peu trop hésitantes. Au final, le vernis s’écaille page après page, et seule Celeste semble bénéficier d’un certain état de grâce.

« La famille Winbury n’est pas du tout comme elle l’imaginait. » (p.219)

Ce thriller, que l’on pourrait qualifier de « domestique », se dévore. Je ne peux que souligner la qualité de la densité dramatique, littérairement bien troussée. Un pur moment de plaisir !


Un couple parfait, Elin HILDERBRAND, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Séverine Weiss, éditions LES ESCALES, 2024, 411 pages, 23€.

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