A dévorer !

« La femme de ménage », Freida McFadden : sombre désordre…

Pour achever les vacances estivales, une fois n’est pas coutume, je me suis octroyé le plaisir d’un « roman léger », sans prétention apparente. Un titre qui évoque aisément un téléfilm du dimanche après-midi sur TMC. De fait, si on considère le speech initial, nous n’en sommes pas loin : Millie sort de dix années de prison. Le motif ? On ne le saura qu’à la fin. Désespérée de ne pas savoir où vivre ni où trouver un travail digne de ce nom, elle postule comme femme de ménage dans la riche, très riche famille des Winchester. La servilité plutôt que la misère, elle qui vit recluse jour et nuit dans sa voiture.

Son CV, étoffé de quelques « pieux » mensonges, retient l’attention de Nina Winchester. Millie entre dans la maison cossue de ses nouveaux patrons. Le jardinier, qu’elle croise lors de sa venue, lui glisse un seul mot, en italien : celui de « danger ». Millie n’y prête guère attention. Pourtant, lorsqu’elle découvre que sa chambre est remisée dans le grenier et qu’on ne peut la fermer que de l’extérieur, son intuition tressaille. Mais vaille que vaille : elle a une chambre, un logis. Alors elle fera fi de ces avertissements… et du comportement de sa nouvelle patronne.

« Il y a quelque chose d’effrayant dans cette pièce, quelque chose de très effrayant, mais si je réussis à décrocher ce travail, je passerai outre. Facilement. » (p.21)

De fait, Nina joue avec les nerfs de Millie : ordres et contre-ordres se succèdent, des exigences délirantes et des accusations injustes s’accumulent. La jeune femme s’accroche, soutenue par l’affabilité d’Andrew Winchester, le bel époux irréprochable. D’ailleurs, Millie s’interroge : qu’est-ce qu’un homme aussi séduisant et brillant peut-il faire avec une femme plus âgée que lui, psychologiquement instable et physiquement loin des canons de beauté que l’on pourrait attendre de la femme d’un archétype masculin cochant toutes les cases du charme absolu ?

« Il pourrait avoir beaucoup mieux que Nina. Je me demande s’il en a conscience. » (p.107)

Alors, vous le devinez, on attend forcément le moment prévisible où la femme de ménage va faire succomber l’époux irréprochable. Sauf que ce pas de côté, ce moment de bascule ne va pas nous faire sombrer dans le mélo le plus sirupeux qui soit (je vous l’accorde, je l’ai craint). Non, la narration laisse place à la voix de Nina. Et alors tout s’éclaire d’une lumière hautement plus dramatique et subtile. Qui nous surprend de la plus efficace des manières. Et on ne lâche plus le roman, qui s’emploie à démontrer la dualité et le machiavélisme insoupçonnés de ceux qui peuvent nous côtoyer.

« Je savais que c’était trop beau pour être vrai. […] Cependant, je n’arrive pas à me débarrasser de ce sentiment de malaise. Qui me souffle que je devrais partir d’ici tant qu’il en est encore temps. » (p.57)

Une lecture pas si légère que cela, au final. Dans tous les cas, redoutablement efficace : c’est bien, vraiment bien joué de tromper ainsi les lecteurs !

« Ce n’était qu’une illusion. Une comédie. C’est un monstre. » (p.274)

La femme de ménage, Freida McFADDEN, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Karine Forestier, éditions J’AI LU, 2023, 413 pages, 8.60€.

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