A dévorer !

Talentueuse Julian Kerninon : respect !

Je suis très peu adepte des écrits autobiographiques. Malgré le profond intérêt que je peux vouer à certaines personnalités, jamais l’envie d’aller plus loin dans la connaissance de leur vie intime, profonde, ne m’a attirée.

Mais il y a des exceptions. Il y en a toujours. Celle-ci s’appelle Julia Kerninon. Ce n’est pas un hasard : la demoiselle est Nantaise (excusez du peu !) ; son premier livre, Buvard, m’a été offert par quelqu’un de cher ; enfin, j’ai eu le plaisir de la rencontrer lors d’une soirée à la librairie nantaise « La vie devant soi ». Un esprit vif, brillant ; une répartie spirituelle et simple à la fois. Efficace, quoi.

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Dans son nouvel opus, Une activité respectable, Julia Kerninon se livre au témoignage : elle y raconte son rapport à la littérature, hérité de ses parents, et élargit la perspective vers une réflexion sur la place de l’écrivain dans la société : qu’est-ce qu’être écrivain ? qu’est-ce qu’être lecteur ? Quelle légitimité a-t-on ?

On découvre l’histoire du rapport de Julia Kerninon au livre, à l’écriture. Récit du « je », mais qui offre un bel éclairage aux figures aimées : ses parents, ses grands-parents, sa soeur, les amoureux. Récit initiatique, de l’enfant qui découvre les touches d’une machine à écrire à la jeune adulte vivant recluse pendant un an à l’étranger, ne faisant qu’écrire et lire.

J’ai trouvé cette manière de parler de soi et de la littérature fascinante car limpide. Car Julia Kerninon rappelle une évidence : être lecteur, être écrivain, c’est un travail, un combat. La dextérité de la prose et des mots s’acquièrent. Rien n’est une évidence. Hommage évident aux auteurs, aux polisseurs de mots connus et méconnus qui révèlent le monde :

« nous avions beaucoup, beaucoup de chance […] parce que nous avions des livres et que dans les livres les phrases étaient éternelles, noires sur blanc, solides, crédibles – elles n’étaient pas en l’air, elles ne venaient pas de n’importe qui, elles avaient été polies, ordonnées, réfléchies, par des individus précis, attentifs, et elles nous livraient le monde entier, le monde accéléré, perfectionné, lavé de ses scories, sans temps mort, un cours d’eau pur et bondissant, un monde dans lequel nous pouvions nous échapper chaque fois que le monde réel cessait d’être intéressant » (p.24)

 

Au fur à mesure de ce court récit (60 pages), Julia Kerninon affirme et assoit sa légitimité d’écrivain. Comment aurait-elle pu en douter ? Qui aurait pu en douter ? Elle, jeune trentenaire auréolée de prix littéraires pour Buvard et Le dernier roman d’Attila Kiss !

« Aujourd’hui, , bien sûr, toutes les choses semblent avoir trouvé leur place – mais j’ai vécu seule la peur des années où ce n’était pas le cas, comme je vis aussi seule l’effroi des années à venir dont je ne sais rien. » (p.60)

Pour conclure, Une activité respectable confirme que Julia Kerninon est un auteur absolument respectable, à la prose géniale !

Une activité respectable, Julia Kerninon, Ed. la brune au rouergue, 60 pages, 2017, 9.80 €.

 

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