A croquer

« Quand on parle de Lou », Julie Gouazé : aimer malgré la meute hurlante…

Récit d’une rupture, roman d’une rencontre, succession chronologique mais mélange des genres, sans confusion ni contrefaçon, Quand on parle de Lou est un joli et poignant conte, celui d’une femme qui se sépare de son compagnon et a le coup de foudre pour une femme.

Quand on parle de Lou

Seulement, Lou comprend que tant la rupture que la rencontre ne sont pas sans conséquences sur sa vie. Dans un premier temps, elle est progressivement exclue du cercle littéraire dans lequel elle évoluait professionnellement, écartée parce que son ex-conjoint Marc est celui vers lequel convergent tous les regards, Lou ne bénéficiant que de l’ombre de sa lumière. Reléguée en seconde ligne, Lou n’a d’autre choix que de s’effacer.

« Lou a grimpé dans cette tour d’ivoire, qui l’a avalée en douceur et l’a rejetée dans un hoquet de dégoût. A peine sortie, elle a été remplacée. Sans un cri. Juste dans l’oubli de ce qui a existé. » (p.49)

Ensuite, amoureuse de Lucie, Lou expérimente le soudain manque de chaleur des gens à son égard, les regards et les jugements quotidiens. Lou découvre l’homophobie…

« Et le voisin qui ne dit plus bonjour à Lou. Et le primeur qui la regarde avec un air étrange. C’est marqué au fer rouge sur son front. Ça transpire de tout son corps. » (p.120)

Quand on parle de Lou est le récit d’une difficile mais touchante adaptation d’une louve exclue de sa meute, qui trouve du réconfort auprès de ses deux louveteaux, dans une tanière à reconstruire.


Julie Gouazé signe un joli récit dans lequel, sous la forme d’un conte (le motif du loup y devient leitmotiv narratif), les mots deviennent poétiques et sautillants, de la même manière que Lou rebondit avec souplesse sur les regards en coin et autres remarques désobligeantes.

« Lucie. Lou. Loucie. Lou scie. Elle scie le tronc pourri. Elle scie les branches séchées et périmées, depuis trop longtemps. Lou scie en faisant attention de ne pas se trancher les doigts.

Lucilou. Laisser Lou. Les cils où ? Battre des cils. Et s’en revenir. Un regard dans le noir. Le temps d’une caresse. Fermer les yeux et oublier le temps. Pour un instant, ne se souvenir de rien. Même si après tout revient en rafales et vient encombrer la tête et le cœur. Et le corps.

Lucilou. Lucie. Lou » (p.105)

Le phrasé saccadé et imagé suggère l’urgence d’aimer librement, sans besoin d’un loup pour se cacher…

« Vivre sans s’interroger. Surtout sans s’expliquer comment son aimant d’un soir peut s’appeler Lucie. » (p.40)

« Se battre et renaître ailleurs. Recréer un territoire. Inventer de nouvelles règles et faire un pied de nez aux rituels ancestraux. Lou prône l’anarchie de la meute. Révolution du loup. » (p.54)

« La jeune louve est venue défier le vieux mâle. Elle ne veut pas combattre. Elle veut simplement avoir le droit d’exister.

Valse de signes. Parfums de reproches. Effluves de douleurs. Juste quelques mots échangés.

Lucie. Marc. Lou.

L.M.L.

Elle aime elle.

Tout est dit. » (p.141)

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Quand on parle de Lou, Julie GOUAZE, éditions Belfond, collection Pointillés, 2018, 153 pages, 17€.

Roman gracieusement envoyé par le service presse des éditions Belfond.

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