A dévorer !

Le droit de se tromper ? « Faux départ », Marion Messina

Il y a dans ce premier roman de Marion Messina une véritable relecture version 2017 du déterminisme social zolien. Pessimisme assuré mais réaliste.

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Aurélie a 18 ans. Fille de prolétaires purs et durs, elle obtient avec mention son baccalauréat. La suite s’annonce logique, bien que sans réelle conviction assurée : elle gagne son sésame pour l’université de droit dans sa ville d’origine, Grenoble. Mais là, c’est la douche froide : elle ne parvient à s’intégrer à aucun groupe d’étudiants, les cours l’ennuient.

Heureusement, elle rencontre Alejandro, un Colombien qui, appelé par les charmes du vieux continent, ne s’y retrouve pourtant pas en France, galérant pour vivre et survivre. Pourtant, l’idylle entre les deux est une parenthèse magique.

Celle-ci se referme cependant lorsque Alejandro, sans attache réelle pour Aurélie et Grenoble, décide de partir vers d’autres perspectives. C’est le drame : Aurélie de tout quitter et de partir pour Paris.

Mais, loin des succès des ambitieux Rastignac du XIXème, Aurélie se confronte à un véritable échec : sans diplôme, elle est condamnée à assumer des jobs abêtissants et abrutissants (hôtesse d’accueil de remplacement, devant être prête dès 6 heures du matin pour intervenir dans une firme, afficher un sourire de façade pendant des heures et tuer un ennui terrible) ; sans argent, elle est contrainte à la promiscuité des auberges de jeunesse. Retrouver par hasard Alejandro dans une rue parisienne peut-il la sauver, encore une fois ?

Marion Messina signe un redoutable premier roman, scrutant, analysant tous les petits détails qui stigmatisent (hélas avec justesse) les catégories sociales. Elle évite l’écueil des clichés, fort heureusement. Mais, à travers ce récit, l’auteur réfléchit à la vérité de l’ascenseur social : vouloir se tirer vers le haut, est-ce forcément pouvoir ? Les parents sont-ils une aide ou un frein à cette possibilité ? D’une prose presque chirurgicale, Marion Messina dissèque un parcours de vie de deux ans sclérosé par l’ancrage social. Beau départ dans la littérature : bravo !

Faux départ, Marion Messina, Ed. Le Dilettante, 2017, 221 pages, 17€.

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Article Ouest France du mercredi 25 octobre 2017

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