A dévorer !

(In)tolérance conjugale : « Qui ne dit mot consent », Alma Brami

La maltraitance envers les femmes peut parfois dépasser les gestes et la violence physique : quand la torture devient morale, que la dignité de l’épouse n’est plus, qu’est-il encore possible de faire ? C’est là le douloureux thème du récit d’Alma Brami, Qui ne dit mot consent.

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Dans ce récit, Emilie semble former un couple heureux avec son mari Bernard. Chaque parole est ponctuée de mots affectueux, rythmant la journée de chacun de « mon Coeur » et de « mon Ange ». Isolés dans une grande maison de province, les deux enfants loin du nid familial, Emilie et Bernard ne peuvent que goûter à cette apparente fusion des cœurs et des âmes.

Mais Bernard impose à sa femme un adultère permanent : il ramène au domicile conjugal une « amie », sous prétexte de sortir sa femme de l’isolement. On se doute bien que c’est pour satisfaire ses besoins à lui. Par conséquent, très régulièrement, et selon une mise en scène bien réglée, Bernard amène les « amies » à sa femme. Celle-ci serre les dents et ne dit rien, ayant trop peur de perdre celui qu’elle aime et qui pourtant la torture avec une perversité des plus abjectes. La tolérance d’Emilie n’a d’égale que sa souffrance. Et pourtant, elle consent. A tout. Jusqu’à l’affront ultime, l’asservissant à son bourreau de mari. Un sursaut est-il encore possible, face à la dernière venue, Sabine ?

Le récit d’Alma Brami est glaçant. Le portrait de cette femme martyre, éperdument amoureuse de son mari et pourtant scandaleusement bafouée, est bouleversant. L’amour y transparaît à chaque page, la mortification aussi. Sublime et dérangeant, tant par le thème que par la prose (les paroles des personnages sont intégrés au récit en les distinguant simplement par le choix des italiques), je recommande chaudement ce roman.

« Mon mari me rapportait ses proies, comme un chat victorieux qui dépose aux pieds de son maître un oiseau, un lézard ou un mulot. Il me demandait ce que j’en pensais, laquelle je préférais, il essayait toujours de me convaincre de leurs qualités multiples. Il me racontait ce qu’il voulait, mais je ne devais pas poser de questions. T’es trop curieuse là mon Coeur, ça me met mal à l’aise, j’ai l’impression que tu fais des fiches. » (p.75)

Qui ne dit mot consent, Alma Brami, Mercure de France, 2017, 165 pages, 16.80€.

 

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