
Jojo a trente-six ans et sa quête de l’amour semble sans fin. Pourtant, des conquêtes, il en a eues. Et de nombreuses ! Il a même été pacsé à Adèle. Car Jojo, il y croit fermement, au concept mariage-famille-déjeuner poulet rôti du dimanche midi. Par conséquent, chaque nouvelle rencontre allume la flamme de l’espoir que ce soit LA BONNE, enfin !
Jojo a pourtant tout pour lui : il vient d’une famille aisée et cultivée, il a un bon poste et cultive sans peine les mondanités parisiennes lorsqu’il y est convié.
« Je suis un produit assez compétitif sur le cruel marché des trentenaires. » (p.9)
Néanmoins, malgré ces atouts non-négligeables, il est le dernier de sa bande de potes à avoir trouvé l’élue. Qu’est-ce qui peut bien clocher chez lui ? ou chez ses prétendantes ? La remise en question est constante, point d’inquiétude là-dessus. Alors, dans l’immédiat, il régale ses comparses des anecdotes heureuses ou malheureuses de ses rencontres.
« Aussi, à la recherche de cette harmonie sublime et idéaliste, j’écume les configurations les plus triviales de la séduction contemporaine en milieu urbain. Avec une alternance entre grandes angoisses, enthousiasme exagéré vite déçu, confiance en l’avenir et épicurisme-en-attendant, parce que quitte à ne pas bénéficier des avantages qu’offre une compagne voire un foyer en termes de stabilité et de sérénité, autant profiter des compensations que propose le monde débridé, et parfois austère, du célibat. » (p.22)
Et le lecteur n’est pas en reste pour être le témoin des différents premiers rendez-vous, qu’ils soient le fait du hasard, arrangés par des collègues et des amis ou encore fomentés par un algorithme de Tinder. Bien évidemment, à chaque fois, c’est le fiasco. L’échec n’est heureusement pas toujours une évidence, mais les causes des espoirs déçus souvent rapides à advenir.
Alors, même si on compatit à ce cœur que l’amour laisse en jachère, on se régale du récit truculent de chacune des rencontres qu’il fait. Le ton est enlevé, jamais empreint de pathos : il y a ce qu’il faut de sarcasme pour mettre à distance le désarroi d’un homme qui désespère trouver le confort d’un foyer mono conjugal tranquille. Et même si Jojo passerait parfois pour un sympathique salaud, il nous touche par ce romantisme affiché, dont le lecteur est le plus sûr confident.
« C’est très déstabilisant d’être abandonné du jour au lendemain, après tant de confiance et de sérénité. C’est un coup à finir drôlement apeuré, à craindre que les rencontres, même les plus prometteuses, cachent toutes quelque vice secret. Comment ne pas avoir peur de ne jamais y arriver ? Peut-être que ce jeu est trop compliqué pour moi et que je suis destiné à rester sur la touche ? » (p.111)
Donc, trouvera ou trouvera pas ?
« Ne pas dévier, continuer son chemin, en apprenant à chaque fois, en tout cas, en s’efforçant d’évacuer les névroses. On rabâche sans cesse que c’est au moment où on l’attend le moins que l’amour éclot. Mais ça implique de s’en foutre vraiment, et d’envoyer balader des idées extrêmement lourdes et ancrées, de timing, de pression sociale, de schéma, de femme idéale, de couple parfait. Quand on sera serein et qu’on enverra la bonne vibration au monde, il nous renverra la bonne dulcinée et on la remarquera tout de suite avec son petit air de dulcinée. » (p.175)
Une petite pépite savoureuse à laquelle je ne m’attendais pas du tout. Et une certitude : les vrais romantiques existent, si si !
Tue-l’amour, Louis DABOUSSY, éditions LEO SCHEER, 2021, 181 pages, 17€.