A croquer

« Confessions d’une radine », Catherine Cusset : un sou est un sou, qu’on se le dise !

J’affectionne tout particulièrement la plume de Catherine Cusset, chroniquée il y a peu encore (La définition du bonheur – 2021). Traînait dans ma bibliothèque ce texte de 2003, Confessions d’une radine, que j’avais oublié. Et bien autant dire que Catherine Cusset n’est point avare en anecdotes !

Son personnage, une femme, narre, de son enfance à l’âge adulte, diverses situations qui ont mis à rude épreuve l’endurance de son porte-monnaie à l’épreuve : des vols de babioles à onze ans à celui de livres ou de pulls à presque trente ans ; les bénéfices à être entretenue par un ami, un amant ou un locataire ; les situations à risque qui mettent en péril le porte-monnaie ou l’honneur de la radine… Autant d’instantanés de vie que la narratrice conte avec un sens de l’à-propos. Et les formules de l’écrivaine de faire mouche (on peut être « avare » de mots et dire efficacement l’essentiel, preuve en est…). C’est sans complaisance qu’elle reconnaît son souci de l’économie et des bonnes affaires. Avare ? De là il n’y a qu’un pas !

« Je suis radine mais j’aimerais ne pas l’être. La première victime de ma radinerie, c’est moi. En effet je crois que vivre c’est dépenser, jouir, donner sans compter. Surtout, ne pas compter. Je peux me mettre en colère contre moi. Je peux réagir contre. Il n’en reste pas moins : mon premier instinct, c’est d’être radine. » (p.87)

C’est ainsi qu’au-delà du caractère anecdotique, Catherine Cusset réfléchit en quoi le rapport à l’argent peut influer sur les relations avec autrui, notamment lorsqu’il est question de générosité et, de façon plus générale, d’altruisme. Le radin est-il foncièrement égoïste ?

« Je fais beaucoup de cadeaux. De ce point de vue je suis généreuse. Je me défie de nommer un seul cadeau qui n’ait pas été une bonne affaire. » (p.62)

Notons enfin que j’ai particulièrement aimé le dernier chapitre, dans lequel il est question de l’écriture et de l’avarice : écrire serait-il un acte de don ultime grâce auquel l’argent reste sauf ? Jouissif de considérer la narratrice se livrer à un tel nombrilisme quelque peu désabusé. Une rédemption littéraire ?

« Être radin, ce n’est pas simplement avoir du mal à ouvrir sa bourse. C’est autre chose dont je parle : une attitude de suspicion, de rétention, de calcul et de paranoïa. Je la condamne et me bats contre elle. Il me se qu’elle est une diminution d’être. Mais elle est un instinct premier. C’est elle qui fait que je me déteste. » (p.71)

Lucidité plaisante d’un regard sans complaisance sur elle-même, la radine est prodigue avec ce bon moment de lecture !


Confessions d’une radine, Catherine CUSSET, éditions GALLIMARD / format poche FOLIO, 145 pages, 5.70€.

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