En onze nouvelles, l’écrivaine macédonienne Rumena Buzarovska narre des instants de vie de couples. Son angle de narration : un « je » féminin décliné en autant d’épouses différentes, mais toutes solidement reliées à un homme. Cet homme, justement, est un mari tantôt autoritaire, tantôt d’une douceur d’agneau ; parfois volage, parfois désespérément ennuyeux ; il peut être inattendu ou totalement prévisible ; condescendant ou avare de compliments… Au final, le portrait de ces hommes n’est pas forcément des plus flatteurs.
Manichéisme féministe ? Peut-être pas car, en miroir, il y a ces femmes qui se soumettent pour certaines bien volontiers aux injonctions masculines ou aux diktats du patriarcat. Ces femmes qui dans l’ombre pestent contre la déliquescence physique de leur moitié et ne pipent mot, par peur et par principe. Si équilibre conjugal il y a, alors il ne l’est que dans une perception archaïque et institutionnelle d’un pays.
« C’est ton mari. C’est toi qui l’as choisi, c’est toi qui dois le supporter. Pas question de divorcer […] Tu ne dois pas le chasser de la maison, parce qu’il risque de ne pas revenir » (p.43)
Quoique… les relations de couples sont-elles soumises à un déterminisme social et culturel ? Rumena Buzarovska ne nous tend-elle pas à nous, lecteurs (et surtout lectrices), le miroir de la conjugalité pour mieux questionner la nôtre, qu’importe ses forces et ses fragilités ? Au cœur des vicissitudes intimes et autres turpitudes du quotidien se cachent parfois des bribes de déclaration amoureuse, souvenirs de l’allégeance éternelle que les liens du mariage à jamais scellent.
Un recueil savoureux, inédit, tendrement féroce et savamment cruel.
Mon cher mari, Rumena BUZAROVSKA, traduit du macédonien par Maria Bejanovska, éditions GALLIMARD, 2022, 174 pages, 18.50€.
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